samedi 12 septembre 2009

Istanbul boit la tasse

On appelle cela ''la chance du journaliste''. Vous arrivez quelque part et il se produit un fait dramatique. Un peu cynique comme raisonnement, vous en conviendrez, mais ce n'est pas de moi. J'apprends donc a mon arrivee qu'une inondation a eu lieu a Istanbul, engloutissant tout un pan d'autoroute et les habitations avoisinantes. Les medias parlent de 35 victimes. Je decide de me render sur place le lendemain.
Le sinistre s’est produit a Itikelli, une banlieue situee en peripherie d’Istanbul. D’ordinaire, le trajet en bus depuis Taksim, le centre ville, demande 20 minutes a tout casser, ce jour la il m’a fallu deux heures pour arriver a Itikelli.
Le deluge a fait de sacres degats dont on peut mesurer l’etendue depuis le pont qui enjambe l’autoroute a cet endroit. De la, on apercoit le troncon englouti et les magasins, en bordure de route, ravages par les eaux. Un veritacle marecage urbain.
La foule a beau s’echiner a vider les rez-de-chaussee, il en revient toujours davantage en boue, fiente, gravas, ferraille...
Et pourtant, tout le monde y met du sien sans se poser la moindre question. L’instinct de survie a pris le dessus.
Sur l’autoroute deserte regne une ambiance de farwest. Les convois de secours roulent a vive allure, soulevant derriere eux une epaisse poussiere. De temps a autre, une horde de gamins curieux traverse la double voie pour y voir de plus pres. Je tente vainement de soutirer quelques informations aux gars de la securite. L’anglais n’est pas de rigueur ici et la curiosite d’une etranger est a juste raison le cadet de leur souci.
J’arpente de long en large la zone sinistree, prend des photos plutot mauvaises et finis par me demander ce que je fous la. La chaleur finit par avoir raison de moi et je decide de rentrer.
Je n’aurais en definitive pas servi a grand chose. Qu’esperais-je? L’intrepidite n’a jamais fait de heros et elle ne commencera certainement pas par moi.

Le soir, j’achete un billet pour l’Ukraine. Le bateau part le lendemain a 9 heures et arrive 24 heures plutard a Odessa. Je me couche avec une biere dans le ventre et les jambes en feu.

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